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#Dystopie Et si les réseaux sociaux n’existaient plus ?

Depuis une quinzaine d’années, les réseaux sociaux ont envahi notre vie. LinkedIn, Twitter, YouTube, Facebook, Instagram, Pinterest, Twitch, Discord, Snapchat et autres TikTok ont envahi notre vie. Et s’ils n’existaient plus ? Et si du jour au lendemain, fin de partie. Plus aucun réseau sociaux ? Comment en sommes-nous arrivés là ?

Avec Christian, Magali, Ingrid et Yvon , nous avons imaginé cette dystopie enregistrée en direct sur Twitter Spaces.

#Dystopie

Les réseaux sociaux n’existent plus ! Depuis ce 28 avril 2041, les réseaux sociaux n’existent plus ! Cela faisait déjà 25 ans qu’ils avaient envahi notre quotidien et pourtant, le couperet est tombé. Les réseaux sociaux ont dû fermer leurs portes. Ils sont allés trop loin. Beaucoup trop loin… et décision a été prise de les couper. Les réseaux sociaux n’existent plus. Cela faisait déjà quelques années que l’on sentait le vent du boulet se préciser.

Dès 2025, les premiers signes étaient apparus. D’abord furtivement, puis de manière plus visible. Il faut dire que depuis 2019, les réseaux sociaux passaient leur temps à se copier, à rajouter de nouvelles fonctions pour nous rendre plus accro mais surtout pour tenter de faire face à l’arrivée massive des super apps chinoises. Ces super apps qui regroupent en une seule application toutes les fonctions nécessaires à notre quotidien. Lire, jouer, acheter, commander, travailler, payer… tout passe désormais par ces super apps. Les réseaux sociaux l’avaient anticipé et avaient tous tenté de se faire plus gros, plus forts. Ils avaient cherché par tous les moyens à agréger plus de fonctionnalités pour éviter de se faire “disrupter” comme on disait dans les années 2010. So 2010, se faire disrupter !

Mais en même temps, peut-on leur en vouloir ? Innover ou périr, telle était la question. Alors, ils ont tous cherché à ne pas se faire disrupter par les géants chinois. Et tout a commencé à sentir le roussi justement parce qu’ils ont tous voulu tout faire, tout proposer dans leur application. Jack Dorsey avait tiré le premier en 2023 en intégrant dans l’application de Twitter, les services de paiement de Square, son autre société. Facebook avait répliqué violemment début 2024 en réussissant le mariage de toutes ses applications au sein d’une seule et unique super app du nom de Libra. Celles et ceux qui ont plus de 20 ans se rappelleront que Libra était le nom donné en 2019 par Facebook et un consortium d’autres sociétés qui avaient déjà à l’époque l’ambition de lancer un nouveau système monétaire numérique privé.

Au lancement de la nouvelle super app de Facebook, les utilisateurs avaient bien entendu ralé, certains menaçaient même de quitter Facebook. Les gens n’aiment pas le changement ! Mais Facebook avaient prévu le coup et avaient embarqué dès le début de l’aventure son arme fatale : les influenceuses d’Instagram, ces vedettes mondiales qui en 2024 rappelons-nous cumulaient des millions de followers, de faux lovers comme on disait à l’époque. Et ces influenceuses avaient fait le job. Rendre cool et addictive la super app Libra. Facebook avait gardé son avance et talonnait dorénavant les géants chinois. Tout allait bien dans le meilleur des mondes, mais que s’est-il donc passé pour que les réseaux sociaux ferment définitivement leur porte ce 28 avril 2041 ? Qu’est ce que les principaux acteurs avaient donc fait pour tuer la poule aux œufs d’or, rencontrer l’ire des principaux gouvernements, et, beaucoup plus grave, se mettre à dos leurs utilisateurs, ceux-là même qui leur avaient permis de devenir plus forts que certains États, plus riches que jamais. Ceux-là même qui les avaient portés aux nues, se détournaient par million des réseaux sociaux depuis le mois de mars 2040. Que s’était-il donc passé ? Qu’est ce que les principaux acteurs avaient donc fait ?

Certains pointent le déclencheur sur la crise sanitaire, accélérant des dispositifs à tout va, à coup de versions bêta à grande échelle, séparant les utilisateurs par communautés liées à du matériel, isolement des classes et lassitude à la clé. D’autres pointent tous ces règlements sur la protection des données, entre les bêta non finalisées, véritables trous de sécurité, les dérives des dispositifs et les partages commerciaux, la vie a été dure pour les données de tous. D’autres pointent les opérateurs, un réseau de plus en plus performant, rapide, enrichi, une géo-localisation au cm, le moindre geste (parole et vue) capturé, transmis, analysé. Il est vrai que les prédictions via les machines, ce que l’on appelait intelligence artificielle, n’étaient au début que de simples algorithmes, mais les dispositifs sont devenus tellement performants que la machine savait tout avant nous, et avait même prédit la fin des réseaux sociaux.

D’autres encore pointent les réseaux eux-mêmes… C’est dans les années 20 que ça avait commencé. Les principaux acteurs s’étaient enfin décidés à supprimer réellement les comptes qui présentaient des discours agressifs, homophobes, racistes, misogynes, dangereux… Les réactions ne se faisaient pas attendre et les haineux sautaient d’un réseau à l’autre, sans difficulté. De plus en plus les contenus étaient dichotomiques, plus de mi-mesure, et paradoxalement une “cancel culture” grandissante. Jusqu’à ce que… on ait tout effacé… Plus rien à se raconter… Je crois que le point de départ, et il aura fallu près de deux décennies pour que tout explose, ça a été ce hashtag, #24avril, qui a provoqué un tollé à retardement. Indignation, puis représailles contre les réseaux qui ont permis ces relais. Rapidement, on avait fait disparaître, quelques semaines plus tard, tout ce qui avait eu trait à ce #24avril, plus de traces. Les réseaux qui permettraient à tous les haineux de déverser leur hargne, à tous de dire tout et n’importe quoi surtout en agressant les autres, juste pour garder leurs chiffres de fréquentation, leurs abonnés, leurs followers, leurs instagrammeurs et tiktokeurs, leurs LIBREURS… sont allés très loin. Et comme à tout excès on a un excès inverse, un peu une poussée d’Archimède numérique, la suite a été en toute logique… RIEN. La goutte d’eau, cette montée lente mais inexorable vers le trop plein de haine pixelisée, de cancel culture numérique… Plus rien à se dire, sur plus rien. Il fallait arrêter net tout cela, des gens scotchés à leurs écrans, hypnotisés par le rien, dans l’attente éteinte, inerte et apathique d’un tweet, d’un post, même d’un chaton qui passerait sous leurs yeux au lieu de ces statuts grisés au contenus grisés de profils grisés… et il y avait les autres, de plus en plus nombreux. Ceux qui levaient les yeux, et qui sortaient de ce vide; des anciens réseaux si prolifiques… Plus rien…

Ils étaient allés trop loin. Beaucoup trop loin. Au départ, les politiques avaient laissé faire et puis des voix ont commencé à se faire entendre.

Aux élections présidentielles de 2027, une femme s’était enfin levée. Le fameux hastag #24avril en 2021 avait été celui de trop. Sa campagne électorale préconisait l’abandon des réseaux sociaux. Elle souhaitait de tout cœur que les relations humaines redeviennent naturelles et que chacun se remette à repenser par lui-même. Plus personne pour vous dire quoi penser, ou comment vous habiller. Si vous aimez le vert, portez du vert, même si les influenceurs vous disent que c’est le rouge qui est à la mode. Son programme était simple : redevenez vous et arrêtez de vouloir faire croire que vous êtes ce que vous n’êtes pas , pour quelques «like » en plus. Ce faisant, elle disait pouvoir résorber le trou de la sécu sociale. Si les gens cessaient de faire semblant, ils se sentiraient mieux dans leur peau, et prendraient moins de tranquillisant. Son slogan était « Cessez de vous faire influencer, redevenez vous »

Redevenez vous-même. Ce slogan avait beaucoup fait parler de lui. Un signal de plus que le début de la fin, était déjà lancé …

Le début de la fin… Il aura fallu du temps, il aura fallu se retrouver face à soi-même devant ces écrans vides, face à ces autres qui n’étaient plus par réseau interposé, face à la réalité des gens, des choses. Redevenir soi-même ça prend du temps, mais il est temps, justement…

La question qui se posait était : la réalité est elle si moche, pour que l’on ressente le besoin de faire semblant sur les réseaux sociaux ? Cette femme qui se levait voulait persuader tout un chacun que non… c’était la réalité qui était la plus belle. Elle pouvait être belle si l’on décidait qu’elle l’était. Si l’on décidait d’arrêter de se plaindre et de se contenter de ce que l’on as et de se mêler de la vie des autres, oui la vie pourrait être agréable.. Et si la vie est agréable, alors plus besoin de faire semblant, et plus besoin non plus de réseaux sociaux. Restaient à trouver des personnes convaincues. Parce que pour avoir la majorité à l’assemblée il lui fallait des députés à cette femme qui s’était levée

Elle a commencé à rallier à sa cause des députés parents, qui n’en pouvaient plus de voir leur progéniture le menton baissé et les pouces adolescents déjà arthiteux; ensuite, ce furent des députés en couple, qui n’en pouvaient plus non plus de passer des dîners en face de l’autre qui lui dinait plutôt avec son téléphone ou sa tablette…

Qu’est-ce qu’ils avaient fait ? Ou plutôt, qu’avaient-ils oublié de faire ? Innover ou périr, il n’y avait pas d’autre issue à leurs yeux. Alors, ils ont cherché à innover et à innover encore, innover toujours sans plus se rendre compte que leurs innovations n’étaient que de pâles copies de ce que faisaient déjà les autres en mieux. Et pendant qu’ils gaspillaient leur énergie dans cette guerre fratricide, ils négligeaient tout le reste, à commencer par leurs propres utilisateurs. Grave erreur. Ils ont baissé la garde sur les domaines collatéraux, comme la sécurité notamment, et ils se sont laissés déborder. De nombreux scandales ont éclaté suite à des fuites massives de données personnelles. Ils ont essayé de les colmater, mais le mal n’a fait qu’empirer d’années en années. Tout le monde en avait conscience, mais chacun pensait que cela ne concernait que son voisin jusqu’au jour où il se trouvait confronté à un problème grave comme le vol d’identité. On recensait de plus en plus « d’apatrides numériques », joli nom donné à toutes ces utilisateurs qui évoluaient désormais dans un monde où, légalement, ils n’existaient plus et où tout aussi légalement, quelqu’un d’autre vivait leur vie.

Tout a basculé en 2041 quand un groupe de white hackers a montré, preuve à l’appui, que toute donnée, aussi confidentielle fut-elle, était aussitôt disponible dès qu’elle était publiée , même dans un espace protégé. Comme cela n’a suscité aucune réaction d’aucune part, ce groupe a eu l’idée de noyer toutes les données réelles dans un océan de données imaginaires. La méthode était simple : rien ne ressemble plus à une donnée réelle qu’une donnée fausse. Alors, ils ont collecté toutes les données disponibles, ils les ont mélangées dans un melt pot numérique, modifié de façon aléatoire puis multiplié à foison.

Puis, d’un seul coup d’un seul, ce 28 avril 2041, à l’aide d’un algorithme récursif auto alimenté, ils ont réinjecté l’ensemble de ces données fantoches dans les réseaux sociaux, avec un processus d’auto génération piloté par une intelligence artificielle. Face à cet afflux de nouveaux utilisateurs, les maîtres des réseaux sociaux ont d’abord réagi favorablement, se gaussant d’avoir trouvé le saint Graal leur permettant enfin de glaner des nouveaux clients. Mais ils se sont vite rendus compte de la réalité des choses, que ces nouveaux utilisateurs étaient en fait des zombies en puissance. Ils ont été débordés et leurs systèmes se sont mis en surchauffe rapidement.

Quand ils ont voulu réagir, c’était trop tard. Le ver était dans le fruit. La vérité noyée dans le mensonge. Plus aucune donnée des réseaux sociaux n’était fiable. La donnée était certes là, mais aucun moyen de la vérifier puis que tout l’écosystème baignait désormais dans un cloaque infâme où le vrai côtoyait le faux sans que personne ne soit capable de faire le distinguo.

Alors, afin de rassurer les utilisateurs, ils ont voulu se créer une nouvelle virginité et c’était à celui qui publierait la donnée la plus fiable, la plus exacte, la plus pure, la plus originale, au sens étymologique du terme. Et pour cela, ils ont cru trouver la parade en créant un indice de fiabilité de la donnée qu’ils ont corrélé avec un facteur de visibilité de façon à n’afficher que des données fiables. Et c’est ainsi que leurs pages sont devenues désespérément blanches et vides de tout contenu. La triste réalité apparut au grand jour : Au royaume des réseaux sociaux, tout était désormais faux. Ils ne servaient alors plus à rien.

Vidés de leur substance, les réseaux sociaux ont alors disparu laissant derrière eux le goût amer d’une aventure qui aurait pu être différente.

Photo https://unsplash.com/@kaedu

Bien entendu, tout ce que tu viens de lire n’est que pure dystopie, une pure invention qui ne reflète pas la réalité.

Immense merci à Christian, Magali, Ingrid et Yvon pour avoir participé à ce cadavre exquis dystopique enregistré en direct sur Twitter Spaces.

Proposé par
PPC

Digital Evangelist, explorateur numérique né à l’ère du web 2.0, des blogs et YouTube, je suis spécialiste du live, anchorman de conférences, interviewer et podcasteur.

Entouré de cette merveilleuse Rédac'room, j'ai la joie d'animer en direct à 7h25 du mat sur LinkedIn #BonjourPPC, le rendez-vous de celles et ceux qui interviewent nos invités.

Les enregistrements sont ensuite disponibles sur Apple, Google, Spotify et Deezer sans l'un des trois podcasts suivants : "Le digital pour tous", "Le web3 café" ou encore "MGMT : Management nouvelle génération".

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