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Stress et télétravail en période de confinement, une opportunité à saisir !

La situation actuelle de confinement bouleverse, parfois violemment notre santé pour certains, nos habitudes, nos relations aux autres et notre rapport au travail. De crise sanitaire, nous pouvons passer rapidement à une crise familiale, personnelle, professionnelle… Pour celles et ceux qui ont la chance de traverser cette période sans trop de dommage, il est possible de voir cette période comme une véritable opportunité.

Comment notre cerveau peut transformer des contraintes en opportunités!

Cette crise est pour notre cerveau l’occasion de faire fonctionner sa métacognition, c’est-à-dire de prendre du recul, de remettre en cause ses routines de raisonnement et de comportements pour choisir éventuellement d’en adopter des nouvelles. Le télétravail en est un bon exemple : il permet de reconsidérer nos points de vue sur la gestion du temps au bureau, sur le temps de transport, sur l’utilité des excès de reporting, sur le management, sur le sens même que nous donnons à notre travail.

Pour effectuer ces changements, notre cerveau recèle des trésors de ressources pour faire face dans la situation actuelle. Nous pouvons même progresser vers un meilleur équilibre de vie. Alors quelles sont les sources de stress particulières au télétravail en période de confinement et de crise sanitaire ? Quelles sont les ressources pour y faire face ? Et si finalement nous utilisions cette période particulière pour apprendre à mieux gérer notre stress et à plus équilibrer notre vie privée par rapport à notre vie professionnelle ?

Trois facteurs impactent notre gestion du stress lié au télétravail dans la période actuelle

Le stress est un composant de nos mécanismes humains d’adaptation en réaction à des évènements dans notre environnement. Nos comportements habituels ne nous permettent plus d’apporter des réponses efficaces aux situations auxquelles nous sommes confrontés. Nos réactions au stress peuvent être de différentes natures : physiologique, psychologique ou comportementale. Il est d’autant plus important de savoir gérer son stress que le confinement et le télétravail vont durer plus longtemps que les quelques semaines initialement prévues.

La crise sanitaire actuelle et le confinement obligatoire soudain introduisent au moins trois facteurs particuliers impactant notre gestion du stress : 1. un contexte mortifère anxiogène lié à la crise sanitaire, 2. une absence de séparation entre vie privée et vie professionnelle, 3. une adaptation subie et rapide liées à la mise en place non préparée du télétravail. Chacun de ces trois facteurs peut être une source de stress mais également une opportunité pour gagner en qualité de vie, professionnelle et personnelle. Même si cela demande un effort, parfois très difficile à faire selon les contextes de confinement ou de santé, nous avons le choix de voir dans la situation actuelle l’opportunité de faire évoluer le fonctionnement de notre cerveau et nos comportements, individuellement et collectivement et notre position vis à vis de notre travail.

1. Un contexte mortifère et anxiogène peut-être un véritable déclencheur qui nous amène à changer notre rapport au travail et à l’organisation de l’entreprise.

Les réactions au stress, provoquées par un environnement morbide et incertain, peuvent naturellement générer chez nous différentes émotions telles que de l’anxiété, de la tristesse ou un sentiment d’abattement. Un épisode comme cette crise peut faire évoluer en quelques jours tout ou partie de nos certitudes, sur lesquelles nous avions fondé notre vie, notamment dans sa dimension professionnelle. Des choses tenues pour acquises deviennent totalement incertaines dans ce contexte d’une extrême lourdeur (combien de fois par jour avons-nous lu ou entendu les mot « mort » et « guerre » durant les premières semaines de la crise sanitaire ?). Paradoxalement ce trop-plein de morbidité, d’anxiété et d’incertitude peut servir au cerveau de déclencheur d’une crise d’homéostasie, comme l’appellent les neuroscientifiques, c’est-à-dire une modification de l’équilibre du cerveau telle, que celui-ci est en capacité de changer ses routines cognitives (1) et comportementales. C’est pour nous, individus, l’occasion de « faire différemment ». Car comme le dit Edgar Morin « […] vivre, c’est naviguer dans une mer d’incertitudes, à travers des îlots et des archipels de certitudes sur lesquels on se ravitaille […] ». Une bonne capacité à gérer le stress est d’autant plus importante actuellement car il s’ajouter deux autres sources potentielles de stress que sont le confinement et la mise en place non préparée du télétravail, de façon rapide et à grande échelle.

(1) cognitive : se rapportant aux processus mentaux en lien avec la connaissance : raisonnement, langage, mémoire, apprentissage, prises de décisions, …

2. Une absence de séparation entre vie privée et vie professionnelle peut-être une vraie source de stress et d’épuisement si le cerveau n’a pas le temps de « souffler » et a fortiori de récupérer entre le temps de travail et les tâches domestiques et familiales. La manque de cloisonnement entre les sujets d’ordre privé et ceux d’ordre professionnel peut mettre en tension certaines personnes attachées à bien séparer leurs activités. Pour peu qu’il y ait des enfants, dans l’environnement de confinement, la situation peut être beaucoup plus difficile à gérer. Enfin, effectuer des tâches activités professionnelles et personnelles dans le même espace peut faire perdre leurs repères à certains et générer du stress qui se transforme en tensions et en conflits.  

3. Une contrainte d’adaptation subie et rapide liée à la mise en place non préparée du télétravail représente un changement. Comme tout changement, il nécessite des efforts d’adaptation et génère des freins. La mise en place du télétravail a été tellement soudaine qu’elle n’a pas fait l’objet de préparation ou d’accompagnement dans la très grande majorité des cas. Si nous en sommes encore dans la phase de sidération dans cette situation de crise sanitaire, il est imaginable que des effets à venir se fassent sentir sur les individus mis en télétravail de cette façon.

Face à ces constats, les réponses pour gérer le stress se situent à plusieurs niveaux.

Organiser son travail de façon adaptée : anticiper, lors d’un moment de calme, en les préparant à l’avance des tâches qui peuvent être réalisées avec différents niveaux de concentration, de fatigue, de stress. Cela permet ensuite dans la journée de s’adapter au rythme des collègues et des proches confinés, en minimisant l’impact d’évènement aléatoires. Par exemple, si un collègue a dix minutes de retard pour une visioconférence, je peux m’occuper efficacement avec une tâche adaptée préparée à l’avance ou décider d’en profiter faire un exercice de respiration ou encore pour passer ce temps avec mes enfants. Dans le même esprit, il est important en période de télétravail confiné, de bien gérer les interruptions inopinées grâce à une bonne flexibilité mentale et émotionnelle. Concrètement dans notre cerveau, un certain type de mémoire (il y en a plusieurs), appelée « mémoire de travail » est pleine d’informations utiles pour la tâche que nous sommes en train d’effectuer sur le moment. Lors d’une interruption, il faut décharger tout ou partie de cette mémoire pour la « remplir » de nouvelles informations en lien avec le motif de l’interruption (« Papa, il n’y a plus de N*****A ? »). Cela demande un effort à notre cerveau qui peut vite se transformer en frustration de ne pas pouvoir terminer la tâche initiale. Il est clair qu’au bout de la dixième interruption en moins de deux heures, une certaine tension, voire plus, peut naître légitimement en nous !  

Instaurer des repères bien définis dans le temps et dans l’espace : pour cela, les rituels aident le cerveau à comprendre « pour de bon ». Une action habituellement banale gagne à être ritualisée. Par exemple la fin de journée de travail peut être marquée par le rangement du matériel professionnel dans un endroit particulier, un chant ou l’énoncé de paroles à la façon d’un mantra qu’il est temps de passer à autre chose. un autre levier qui fonctionne bien pour marquer des repères est de joindre le geste à la parole. Tout ce qui est lié au corps, ce que l’on appelle « somatique », est en connexion directe avec notre cerveau et facilite la compréhension des messages « envoyés » à celui-ci.

Bien traiter son cerveau et son corps (hydratation, oxygénation, alimentation, modération du sucre, de l’alcool, sommeil…) : à ce titre l’entretien physique est fondamental. Même en intérieur et avec une pièce bien aérée, des étirements, des exercices de respiration pour une bonne oxygénation mettent notre cerveau dans de bonnes dispositions pour gérer efficacement le stress et pour mieux réguler nos émotions. Cela nous reconnecte à nous-mêmes et nous pouvons ainsi mieux mobiliser nos ressources internes comme la mémoire, la concentration, la flexibilité mentale et émotionnelle,… Alors tout ce qui peut y contribuer comme le yoga, la méditation pleine conscience, les exercices de respiration favorisent une bonne pratique du télétravail. Il est également utile de penser à avoir des temps de déconnexion des écrans également et de pratiquer des exercices de relaxation des yeux. Enfin, couper les notifications et être attentif à la qualité de notre sommeil est utile pour éviter la dispersion de l’attention et l’augmentation de la charge mentale qui peuvent amener rapidement à une forme d’épuisement.

Garder des moments qui nous font du bien, seul et avec du monde : entre les temps de connexion à l’écran et ses proches et les notifications, nous sommes sollicités en permanence. Avoir des activités personnelles, professionnelles ou pas, seul ou en groupe, qui nous sont agréables et nous « nourrissent » et/ou nous défoulent comme écouter de la musique, écrire, peindre, chanter, danser, crier, faire des vidéos façon sketches pour les amis, … sont des temps indispensables.  Au-delà de passer un moment agréable et divertissant, il est important pour notre cerveau d’avoir des moments que nous passons seuls, « avec nous-mêmes » sont au même titre qu’une bonne qualité de sommeil.

Communiquer de façon explicite ses émotions : le télétravail nécessite de passer par des écrans pour s’exprimer. Cela nous prive d’une grande partie de la communication non verbale qui nous procure une quantité importante d’informations pour notre cerveau en face à face ou au téléphone (les temps de pause de la voix, le souffle, l’intonation, …) Or les êtres humains que nous sommes ont besoin des émotions dans leurs interactions. Apprendre à exprimer ses attentes, dire ses émotions, ses ressentis est d’autant plus important en mode télétravail confiné car nommer les choses, que ce soit les émotions, les ressentis, c’est les faire exister du point de vue du cerveau. Cela participe à une régulation des émotions (voir paragraphe suivant). Et souvenons-nous que nier ses émotions en pratiquant à l’excès la suppression émotionnelle (« je ne ressens rien, je suis fort », « je n’ai pas le temps de m’apitoyer sur mon sort », « exprimer ses émotions est réservé aux personnes trop sensibles » , « je tiendrai car j’ai besoin de mon salaire ») peut conduire à l’épuisement et au burn-out.  

Apprendre à réguler ses émotions de façon adaptée : la régulation émotionnelle est un mécanisme clé dans la gestion du stress. Avec le télétravail, c’est l’occasion d’interroger ses pratiques de régulation et de veiller à bien équilibrer ses pratiques. Les échanges à travers les écrans facilitent des mécanismes d’interprétations et de projection des intentions de « l’autre », sans que celui-ci ou celle-ci ne puisse nous retourner des informations sur la justesse ou pas de notre ressenti. Les échanges verbaux avec des tiers sont de bons moyens de partager les émotions et les ressentis.

Maintenir une vie sociale professionnelle et personnelle : l’humain est un animal social qui a besoin de relations à l’autre. Cela lui permet entre autres de garder un sentiment d’appartenance et de communiquer ses émotions, comme vu plus haut. Savoir créer des occasions d’échanges impromptus ou sans objectif autre que de « lâcher la pression » ou témoigner l’intérêt qu’on porte aux autres est une action très aidante dans la gestion du stress. Cela permet de remplacer en partie les échanges sociaux dans l’entreprise durant les repas ou à la machine à café par exemple.  

En conclusion, vive le lâcher-prise et l’indulgence…tout en gardant le cadre et le cap sur les objectifs !

Pour bien gérer son stress en télétravail confiné, il est très aidant, en plus des actions décrites précédemment de faire preuve de lâcher-prise et d’indulgence pour soi-même et pour les autres : chacun fait du mieux qu’il peut chez lui, comme tous ceux et toutes celles qui télétravaillent de leur domicile. Etre capable de rappeler le cadre qui répond à nos besoins, exprimer ses attentes personnelles et ses émotions avec assertivité et bienveillance sont de réels atouts. Et nul doute que les ressources expérimentées et mises en place durant cette période particulière seront d‘une grande utilité une fois le confinement terminé. Il sera temps de capitaliser notre expérience pour exprimer les modèles d’organisation des entreprises et du travail que nous souhaitons bâtir et ceux dont nous ne voulons plus, individuellement et, espérons-le, collectivement. Nous pourrons dire alors que nous avons saisi l’opportunité dans la situation actuelle de faire évoluer le fonctionnement de notre cerveau et nos comportements pour une meilleure qualité de vie globale et une organisation du travail plus respectueuse du fonctionnement humain.

Illustration Philippe-Élie Kassabi

Jérôme Jubelin

@UMANAO_exp

Président d’UMANAO®, éditeur du dispositif éthique innovant UMANAO EXPERIENCE® , fruit de recherche et développement en sciences cognitives comportementales sur la capitalisation d’expérience chez l’humain pour développer ses mécanismes d’adaptation, soit en situation professionnelle, soit en situation d’inclusion #TechForGood.

A titre personnel, mon engagement s’exprime, en plus du digital pour tous, au sein du mouvement des Entrepreneurs d’Avenir et comme président de l’Association Lyonnaise d’Ethique Economique et Sociale. La vocation de l’ALEES est de promouvoir la pratique de l’éthique, véritable discipline de questionnement par rapport à ses valeurs, dans le champ économique et social.

Comité édito #deLaRoom #BonjourPPC

Linkedin.com/in/jérôme-jubelin

Proposé par
Jérôme Jubelin

Président d'UMANAO

Mon engagement d’entrepreneur d’Avenir s’exprime d’une part à travers UMANAO® et son action résolument humaniste, et d’autre part en tant que président de l’association lyonnaise d’éthique économique et sociale. La vocation de l’ALEES est de promouvoir la pratique de l’éthique, véritable discipline de questionnement par rapport à ses valeurs, dans le champ économique et social.

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